vendredi 27 novembre 2015

Depuis 2012, nous oeuvrons au renforcement de notre sécurité





Après les drames que notre pays a vécus il y deux semaines, il est compréhensible que chacun tente d’identifier des responsabilités, de débusquer les éventuelles « failles » de notre politique de sécurité. C’est là un exercice sain et nécessaire, quand il a notamment pour objet de réfléchir à des améliorations de notre protection. Compte tenu du niveau de menace qui continue de peser sur nos intérêts et notre intégrité, toutes les bonnes volontés et les bonnes idées pour avancer dans notre combat sont naturellement les bienvenues.

Prétendre en revanche qu’il y aurait une ou des solutions miracles de nature à éradiquer, en totalité, la menace terroriste et tout risque d’attentat n’est rien d’autre que manquer à la vérité. Je veux donc ici apporter quelques éléments de réponse à ceux qui pensent détenir les clés infaillibles de ce combat, comme à ceux qui assurent avec un aplomb aussi grossier que mal venu, que les responsables de l’Etat auraient manqué de lucidité sur l’ampleur du danger et se seraient surtout distingués depuis les attentats de janvier dernier par leur inaction.

La réalité, c’est que dès le début de cette législature, c’est-à-dire dès le mois de juin 2012, le gouvernement et la majorité qui le soutient n’ont eu de cesse de mettre en avant l’ampleur du risque dirigé à l’encontre de la France et de ses valeurs de liberté, et d’agir pour adapter notre législation aux modes opératoires évolutifs des terroristes. Me consacrant à ces questions depuis mon élection à l’Assemblée nationale, j’ai été partie prenante de chacune de ces étapes.

Au mois de décembre 2012, une première loi relative à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme a été votée et promulguée. Elle intégrait notamment le renforcement des possibilités de contrôle des communications électroniques, devenues la voie d’échange privilégiée des individus radicalisés et des groupes actifs. Elle approfondissait le régime de prévention et de sanction à l’égard de ceux qui souhaitent partir ou sont partis dans des camps d’entrainement terroristes.

Au mois de novembre 2014, une deuxième loi renforçant les dispositifs de lutte contre le terrorisme voyait le jour pour continuer d’adapter notre droit aux nouveaux visages et aux nouveaux contours de la menace. Elle introduisait une interdiction administrative de territoire, créait un délit d’entreprise terroriste individuelle et ouvrait la possibilité de bloquer les sites internet faisant l’apologie du terrorisme.

Au mois de juillet dernier enfin, la loi sur le renseignement à l’écriture de laquelle j’ai activement participé, était adoptée. Depuis son entrée en vigueur, nos services disposent de moyens humains et techniques spécifiques et agissent sur désormais dans un cadre légal clair, efficace et protecteur des libertés publiques qui n’avait jamais existé auparavant.

Parce que la lutte contre le terrorisme n’est ni de gauche, ni de droite, l’ensemble de ces dispositifs ont pu être débattus par le parlement dans un esprit de consensus et de rassemblement, qui a conduit à leur adoption à la quasi-unanimité au Sénat, comme à l’Assemblée nationale. Je m’étais alors réjoui à plusieurs reprises de cette volonté de cohésion, sur des sujets si sérieux.

Si l’heure est encore moins  à la polémique aujourd’hui, je me désespère cependant de constater que certains de ceux se sont employés à détricoter avec méthode les moyens des forces de l’ordre et de la justice durant deux quinquennats, de 2002 à 2012, puissent avoir l’indécence de se poser en donneurs de leçons et de faire croire à nos concitoyens que les attentats perpétrés sur notre sol seraient le résultat d’un prétendu laxisme de notre part.

Ils ont affaibli les effectifs de nos forces et depuis trois ans, budget après budget, nous sommes en train de recréer les postes supprimés.

En faisant diminuer de 8 % les crédits dédiés à la sécurité durant le précédent quinquennat, ils ont fait prendre un retard considérable et grave en termes de moyens techniques et matériels à la police et à la gendarmerie. Budget après budget, nous oeuvrons à ce que ce retard se comble progressivement.

En supprimant les renseignements généraux et en créant la DCRI, ils ont dramatiquement affaibli nos moyens de détection des signaux dits « faibles » sur l’ensemble de notre territoire. Dès 2013, nous avons recréé un service de renseignement territorial, au sein de la nouvelle Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).

En mon âme et conscience, avec la conviction de celui qui y a étroitement participé, j’affirme donc que tout ce qui était possible a été fait ou entrepris, dès le début de cette législature. J’ai conscience que beaucoup reste à faire. Je prétends cependant que tous les efforts possibles et imaginables ne nous donneront jamais la garantie d’une protection absolue, certains coups étant malheureusement imparables.

J’invite tout cerveau éclairé à se méfier de celles et ceux qui prétendraient disposer de recettes miracle, à s’en défier comme on se défie des charlatans. Je conseille de préférer ceux qui font à ceux qui disent ce qu’ils n’ont pas fait.

lundi 23 novembre 2015

Faire face, ensemble





Alors que tant de commentaires ont déferlé depuis l’horreur de ce dernier vendredi 13, je me suis prioritairement consacré à l’action aux dépens de ce blog, au cours de ces derniers jours.

Me trouvant au Stade de France, ce terrible soir, j’ai pu immédiatement mesurer la force de caractère du président de la République, mais aussi le grand professionnalisme des autorités qui ont su faire face, sans générer de mouvement de panique dans une enceinte de 80 000 personnes menacée par des kamikazes.

La prise de conscience rapide de l’ampleur des crimes perpétrés ce soir-là, l’émotion indicible qu’ils suscitent naturellement, ont très vite fait place à la réaction. Par l’écoute et l’analyse des premières mesures annoncées par le chef de l’Etat dès avant minuit, par l’échange avec toutes celles et tous ceux que j’ai pu rencontrer dans la circonscription durant ce week-end si particulier, par la remontée aux plus hautes autorités de l’Etat des réactions de mes concitoyens.

Lundi à midi, les députés, tous revenus en urgence à Paris, se sont rassemblés comme tant de Français partout sur notre territoire, pour une minute de silence ponctuée d’une poignante Marseillaise dans la cour d’honneur de l’Assemblée nationale. Nous avons ensuite rejoint nos collègues sénateurs à Versailles pour une séance exceptionnelle du Congrès, à l’occasion de laquelle nous avons entendu le discours de François Hollande, déterminé, sans concession face au terrorisme, qui nous invitait à adapter nos règles à la situation dans le respect des valeurs de la France et de la République.

De retour à Paris, je me suis immédiatement mis au travail, aux côtés de mon collègue Jean-Jacques Urvoas pressenti pour en être le rapporteur, sur le projet de loi visant à proroger l’état d’urgence pour trois mois et à renforcer l’efficacité de ses dispositions. Comme je l’ai indiqué en tant que porte-parole du groupe socialiste républicain et citoyen pour ce texte, nous avons travaillé dans l’urgence sur la question de l’état d’urgence. Nous nous sommes cependant efforcés de travailler de manière juridiquement précise, avec la double préoccupation de l’efficience et du respect des principes de notre droit.

A titre anecdotique, notons que l’édition Seine-Saint-Denis du journal « Le Parisien », qui a plutôt pour habitude de passer sous silence le travail parlementaire dont je m’astreins pourtant à l’informer avec une constance qui n’a d’égale que son indifférence, a trouvé cette fois-ci l’occasion de tenter à mon endroit un procès en censure, que le suivi de toutes mes interventions en commission contredit sans ambiguïté. Pas de quoi affaiblir pour autant ma conviction qu'une presse libre est indissociable de l'idée même de démocratie.

Peu à peu, la vie normale va reprendre. Sans oublier les victimes. Sans perdre de vue la menace élevée qui pèse toujours sur la France. Pour ma part, en continuant d’agir comme je le fais depuis plus de trois ans à l’Assemblée nationale et dans le cadre de mes fonctions de membre de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR).

Avec la préoccupation aussi d’expliquer aux habitants de la 12e circonscription de la Seine-Saint-Denis en quoi consiste l’état d’urgence, comme je le ferai mercredi prochain 25 novembre à 20h30 à Clichy-sous-Bois (salle de l’Orangerie) à l’initiative du maire mon ami Olivier Klein.

mardi 10 novembre 2015

Des objectifs et une méthode pour moderniser notre droit du travail




Moderniser le droit du travail : tout le monde reconnaît que c’est nécessaire, mais personne n’a jamais eu le courage d’engager cette réforme. Ce gouvernement y est décidé. Parce qu’aussi complexe et sensible que soit l’exercice, il ne peut plus être encore reporté.

Nous prenons donc nos responsabilités, en enclenchant un utile mouvement, qui permettra à son terme de rendre le code du travail plus lisible, plus clair et donc plus protecteur.  

Le chantier qui vient d’être engagé poursuit un double objectif. Il s’agit d’abord de répondre à un enjeu de compétitivité pour nos entreprises et donc de création d’emploi. Par les empilements successifs de dispositions, notre législation et notre réglementation sur le travail constituent aujourd’hui un frein. Le nier, c’est refuser de regarder la réalité en face. Il convient donc de faire sauter certains verrous, en particulier pour les TPE et les PME pour lesquelles la complexité du droit du travail constitue un puissant motif de renoncement à l’embauche.  

Davantage de souplesse doit être donnée aux acteurs du monde économique, dans toute leur diversité, en précisant de manière plus explicite ce qui relève des droits et des obligations qui s’appliquent à tous les salariés et à toutes les entreprises et ce qui doit procéder d’accords de branches, par ailleurs simplifiés.

Réformer le droit du travail, ce n’est pas pour autant, comme certains le redoutent ou d’autres le voudraient, piétiner les droits des salariés. Le moderniser, c’est au contraire l’inscrire dans le respect et la tradition de notre modèle social. Il faut donc que l’accès aux droits en sorte renforcé. En faisant apparaître de manière plus lisible et compréhensible quelques principes forts et intangibles. Tel est notamment l’objectif du projet de création d’un socle de droits fondamentaux, qui s’imposeront à tous les employeurs et constitueront des garanties connues de tous les salariés. L’élaboration de ce socle de droits sera confiée à une commission d’experts, dont la présidence a été confiée à Robert Badinter.

Ce n’est qu’à partir du travail qui en résultera, que pourra démarrer ensuite la réécriture du code du travail. Dans le même esprit, la loi continuera de garantir des grands principes généraux : le contrat à durée indéterminée, le salaire minimum et la durée légale du temps de travail.

Pour que cet immense chantier aboutisse, une attention toute particulière sera accordée au dialogue social, si difficile soit-il parfois dans notre pays. Le travail de concertation avec les partenaires sociaux et les organisations patronales a d’ores et déjà commencé. Il se poursuivra tout au long du processus de construction de cette réforme d’ampleur et pour chacune des grandes étapes de sa mise en œuvre.

La France ne peut demeurer à la lisière de toutes les évolutions sociales et sociétales qui la traversent, sans les comprendre ni les prendre en compte. Elle doit au contraire les intégrer en temps voulu, pour mieux répondre aux attentes et aux besoins des habitants de notre beau pays. La majorité élue en 2012 s’y emploie, comme jamais aucune autre n’a eu le courage de le faire auparavant.

mercredi 4 novembre 2015

A propos de l'autorité de l'Etat





Dans un entretien accordé au journal « Le Parisien » le 2 novembre dernier, Nicolas Sarkozy a choisi de s’exprimer sur la sécurité. Il est légitime et sain, dans une démocratie, que les formations politiques de l’opposition qui aspirent à gouverner, formalisent des propositions sur les questions majeures qui préoccupent les Français. C’est même plus utile que de se livrer à une critique systématique de l’action de la majorité. Il est cependant dommage que le président du parti qui s’est dénommé « Les républicains », dont le bilan en matière de sécurité a été marqué par les échecs que l’on sait, ne livre à cette occasion qu’un galimatias hargneux, qui semble davantage animé par un esprit de revanche que par un souci d’exactitude et de pertinence.

Amnésie sur les moyens de nos forces de l’ordre
Ainsi, après avoir lui-même lourdement contribué à l’appauvrissement considérable du ministère de l’Intérieur en supprimant 13 700 postes de policiers et de gendarmes de 2007 à 2012, Nicolas Sarkozy explique aujourd’hui qu’il conviendrait de recourir aux heures supplémentaires. Les intéressés, qui en ont déjà accumulé des milliers et dont les représentants ont tous exprimé récemment leur fatigue bien compréhensive au président de la République, apprécieront ! Pour notre part, nous préférons poursuivre le mouvement engagé dès 2012, conformément aux engagements pris. C’est ainsi que nous remplaçons depuis trois ans chaque départ en retraite. Nous créons de nouveau 500 postes supplémentaires pour les deux forces chaque année. Pour corriger le dramatique affaiblissement du renseignement territorial du débat des années 2000, nous déclinons le plan pluriannuel de mise en place de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), qui représente 432 créations nettes d’emplois de tous statuts. Pour faire face à l’augmentation de la menace terroriste, nous avons ajouté à cette réorientation des politiques publiques en direction de la sécurité 1 404 emplois nouveaux, dont 1 100 pour renforcer les différentes composantes du renseignement intérieur.

Confusion sur les missions des policiers et des gendarmes

Nicolas Sarkozy propose aussi le recentrage des missions des policiers et des gendarmes. Sur ce point, il plagie nombre des propositions que j’ai formulées dans le rapport que je viens de présenter à l’occasion de l’examen du projet de budget 2016 pour la sécurité. A ceci près que je ne propose pas de confier la sécurité routière des autoroutes aux sociétés privées concessionnaires. Pour ma part, je considère qu’il n’y a pas de « petit » enjeu de sécurité, qui justifierait que l’Etat s’en désengage. C’est en particulier le cas de la sécurité routière, qui constitue une priorité du gouvernement. 26 mesures ont été annoncées en ce sens le 26 janvier 2015, complétées par 22 autres le 2 octobre dernier, avec l’objectif de passer sous la barre des 2 000 morts annuels sur les routes à l’horizon 2020. Sur la question du recentrage des missions des forces de l’ordre, à ce point près, Nicolas Sarkozy n’avance rien de nouveau par rapport à ce que le président de la République François Hollande a demandé le 22 octobre dernier au ministre de l’Intérieur : formuler des propositions très concrètes d’ici à la fin de l’année, pour une meilleure articulation de l’intervention des forces de l’ordre avec les polices municipales et les acteurs de la sécurité privée.

Omissions sur la lutte contre le terrorisme

Afin de lutter  contre le terrorisme, Nicolas Sarkozy propose de ne pas laisser revenir les étrangers partis faire le djahad et d’incarcérer les Français qui en reviennent. Nous n’avons pas attendu ces suggestions tardives pour agir ! Emprisonner les Français qui reviennent était juridiquement impossible lorsqu’il était chef de l’Etat. Le droit le permet depuis la première loi de lutte contre le terrorisme que nous avons votée et qui est en vigueur depuis le 21 décembre 2012. A ce titre, 133 personnes ont d’ores et déjà été mises en examen et incarcérées. Prévoir d’incarcérer systématiquement un citoyen au seul motif de s’être rendu sur un théâtre de guerre est en revanche contraire à tous les principes qui garantissent l’exercice de la justice dans un Etat de droit. En amont, plutôt que de laisser nos ressortissants quitter la France, le gouvernement entend surtout empêcher les départs et s’est donné les moyens de le faire. C’est un des objets de la deuxième loi de lutte contre le terrorisme que nous avons votée et qui est en vigueur depuis le 13 novembre 2014. L’interdiction de sortie de territoire créée à cette occasion a déjà été appliquée à 190 individus. S’agissant des étrangers résidant en France, cette même loi a créé l’interdiction administrative du territoire, qui a fait l’objet de 55 arrêtés en moins d’un an. En outre, contrairement à l’opposition lorsqu’elle était aux responsabilités, le gouvernement n’hésite pas à utiliser l’ensemble des dispositifs à sa disposition, en recourant également à la déchéance de la nationalité à l’encontre des binationaux condamnés pour des actes de terrorisme (comme l’a indiqué le ministre de l’Intérieur, en réponse à la question d’actualité que je lui ai posée sur ce sujet le 6 octobre dernier) et en procédant à l’expulsion des étrangers qui constituent une menace pour l’ordre public sur le territoire national. Nicolas Sarkozy propose enfin de créer un délit de consultation des sites internet à caractère terroriste. Il feint de méconnaître que le Conseil d’Etat a jugé cette mesure contraire aux principes constitutionnels. Il oublie de rappeler que nous avons fait de la consultation régulière de ces sites un des critères permettant de manifester le délit d’entreprise individuelle à caractère terroriste dans la loi du 13 novembre 2014. Il ne dit pas que c’est cette majorité, dans le même texte, qui a rendu possible le blocage et le déréférencement des sites qui font l’apologie du terrorisme. Il est muet sur le fait que lorsqu’il était aux responsabilités, avait bien fait adopter une loi permettant le blocage des seuls sites à caractère pédopornographique, mais sans jamais avoir mis en œuvre les décrets d’application. Là encore, c’est nous qui nous en sommes chargés, après 2012.

Manque de rigueur sur la légitime défense

Nicolas Sarkozy considère que des policiers confrontés à un délinquant muni d’une arme de poing et refusant de la baisser, devraient être autorisés à faire usage de leur arme de service, sans attendre qu’ils se soient fait tirer dessus. Contrairement à ce qu’il indique, il n’est pourtant pas nécessaire qu’un délinquant ait ouvert le feu pour qu’ils soient autorisés à riposter. L’article 122-5 du code pénal dispose en effet que dès lors qu’une arme, dont il est permis de penser qu’elle a l’apparence d’une vraie arme, est dirigée vers des policiers et qu’ils se considèrent exposés à un risque pour leur vie, ils peuvent ouvrir le feu dans la mesure où leur riposte est strictement nécessaire pour faire cesser l’attaque. Cette question de la légitime défense demeure, pour autant, au cœur des préoccupations du gouvernement. C’est pourquoi le ministère de l’Intérieur travaille actuellement à la création d’un nouveau fait justificatif propre aux forces de l’ordre, permettant de neutraliser un individu armé. Un groupe de travail piloté par les inspections de la police et de la gendarmerie, auquel sont associés des parlementaires de gauche comme de droite, étudie la possibilité de faire évoluer les textes. Mais cette évolution exige à la fois du pragmatisme, de la rigueur et une analyse juridique fine. Il convient en effet de peser toutes les situations concrètes auxquelles sont confrontées les forces de sécurité intérieure, en tenant compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) et de la Cour de cassation. Bref, il s’agit d’une démarche sérieuse, à des années-lumière des formules à l’emporte-pièce dont Nicolas Sarkozy est coutumier.

« La ligne rouge qu’aucun républicain ne peut franchir »
Nicolas Sarkozy propose le rattachement de l’administration pénitentiaire au ministère de l’Intérieur. Christian Estrosi et Xavier Bertrand vont même plus loin, en suggérant l’absorption du ministère de la Justice tout entier dans un grand ministère de l’Intérieur. La modernité n’est pas la marque de cette proposition, puisque l’administration pénitentiaire a été rattachée au ministère de l’Intérieur avant 1911 puis, brièvement, sous le régime de Vichy. L’opposition fait une nouvelle fois-là, preuve de son simplisme sur ces sujets, en concevant la prison comme une oubliette. N’étant pas à un paradoxe près, elle avait au début du quinquennat précédent instauré les peines planchers, sensées remplir les centres de détention, avant d’élargir les conditions d’aménagement de peine deux ans plus tard, ce qui était de nature à plutôt les vider ! Aujourd’hui, Nicolas Sarkozy oublie que l’individualisation de la peine et la préparation de la réinsertion sont des principes à valeur constitutionnelle qui supposent la séparation des pouvoirs ; que les règles de détention sont soumises à des normes de droit européen, qui imposent de distinguer la détention des autres formes d’enfermement, comme la rétention administrative ou l’internement. Quel que soit le rattachement ministériel de l’administration pénitentiaire, il faudra donc toujours un juge indépendant pour prononcer l’incarcération, il existera toujours un juge pour décider d’un éventuel aménagement des peines, de sorte que les espoirs de MM. Sarkozy, Estrosi ou Bertrand s’en trouveront probablement déçus. Tel est d’ailleurs le sentiment de François Fillon, qui n’a pas hésité à affirmer que la séparation entre justice et intérieur était « une ligne rouge qu’aucun républicain ne peut franchir ».

Absence de retenue dans le commentaire des faits divers
Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, s’est distingué, il y a précisément dix ans, par ses invectives au Kärcher, suivies quelques jours plus tard par les violences urbaines les plus graves que la France ait connues. S’il l’occulte aujourd’hui, le député de Clichy-sous-Bois et Montfermeil que je suis ne peut oublier son attitude de l’époque. Et ce seul souvenir, auquel on pourrait ajouter bien d’autres épisodes, l’autorise mal à se faire aujourd’hui le commentateur de faits divers qui, pour regrettables qu’ils soient, demeurent sans commune mesure avec cet épisode dramatique. Rappelons, en outre, que les auteurs des exactions commises lors du Comité central d’entreprise d’Air France ont été mis en cause dans le cadre d’une procédure judiciaire moins d’une semaine après les faits. Que les forces de sécurité ont repris le contrôle de la situation à Moirans deux heures seulement après leur engagement, décidé et mis en œuvre sans délai. Que le professionnalisme des forces de l’ordre, tant à Moirans que sur l’autoroute A1 à la fin du mois d'août dernier, a permis d’éviter la propagation des violences et qu’aucune victime n’a été déplorée, en dépit de la virulence des auteurs des exactions, qui sont ou seront identifiés et devront répondre de leurs actes devant la justice, au terme des enquêtes conduites sous l’autorité des parquets. Je suis également surpris que Nicolas Sarkozy ait choisi de revenir sur l’affaire de Tarnac, pour étayer son éloge de l’autorité de l’Etat. Chacun se souvient, en effet, des résultats désastreux de l’immixtion de l’exécutif de l’époque, dans cette affaire judiciaire. Il existe sans doute des manières plus convaincantes, pour revendiquer l’autorité de l’Etat, que de se glorifier d’une pantalonnade !

Chacun jugera, à la lecture des éléments factuels de cet article, inhabituellement long pour mon blog, de la crédibilité et de la pertinence des propositions de Nicolas Sarkozy en matière de sécurité. Pour ma part, je poursuis sans tapage, mais avec constance, rigueur et détermination, le travail que j’ai entrepris sur ces questions, depuis mon élection à l’Assemblée nationale en juin 2012, afin d'aider le gouvernement à restaurer partout l'autorité de l'Etat.